Déficit public

De Notes Economiques et Politiques

Le solde public d'un pays est la différence entre les recettes et les dépenses des administrations publiques (Etat, collectivités locales et sécurité sociale) pour une année donnée. On ne doit donc pas parler de solde public en tant que tel, mais du solde public de l'année 2020 par exemple. Lorsque le solde public est positif, les recettes sont supérieures aux dépenses, et on parle d'excédent public. Lorsque les recettes sont inférieures aux dépenses, on parle de déficit public (le solde public est négatif). Il est parfois exprimé en pourcentage du PIB.

Notons que le déficit public est un flux (il se rapporte à une année particulière), tandis que la dette publique est un stock, et représente l'accumulation des déficits publics.

NOTA : On parle parfois de déficit budgétaire. Stricto sensu, le déficit budgétaire est l'éventuel déficit de l’État, tandis que le déficit public inclut également les collectivités locales et la Sécurité Sociale.

Quelques chiffres

  • La France a été chaque année en déficit public depuis 1974.
  • Par année[1] :
    • En 2019, le déficit public représentait 3.1% de PIB
    • En 2020, le déficit public représentait 9.0% de PIB (Covid-19 oblige)
    • En 2021, le déficit public représentait 6.5% de PIB
    • En 2022, le déficit public représentait 4.7% de PIB, soit 124.9 Mds d'euros.
  • Un aperçu en schéma :
Le déficit public de la France
Le déficit public de la France

Fonctionnement

De fait, le solde public est composé de recettes :

  • Les taxes et impôts
  • Les ressources non-fiscales (revenus du patrimoine et revenus de l'activité industrielle et commerciale)

Et de dépenses :

  • Fonctionnement interne (achats / salaires / ...)
  • Redistribution
  • Investissements et dépenses en capital.

Si déficit public, et surtout dette publique, il y a, alors les dépenses peuvent être compensées par :

  • une nouvelle dette auprès des organismes financiers (en d'autres termes, par un emprunt)
  • par les recettes publiques excédentaires des années précédentes
  • par une vente de patrimoine
  • par une émission monétaire (utilisation de la planche à billets) ce qui a été fait aux USA par exemple, suite à la crise des subprimes de 2008.

In fine, si l'on souhaite réduire le déficit public, voire la dette publique si elle existe (et en France, elle existe, au vu des déficits qui se sont succédés chaque année), il y a deux grands leviers :

  • Augmenter les recettes
  • Diminuer les dépenses

La réduction du déficit public

L’État ne fonctionne pas comme un ménage, ni même comme une entreprise. Il n'est donc pas forcément logique, même si c'est contre-intuitif, de penser qu'il doit de facto rembourser sa dette et réduire son déficit (pour faire simple, il n'est pas spécialement prévu qu'un État "meure". On peut donc considérer qu'il n'y a pas forcément d'échéance à ce qu'il rembourse un emprunt, contrainte que l'on retrouvera en revanche à l'échelle privée, chez les particuliers comme dans les entreprises, si grosses soient-elles). S'il doit le faire, en tout cas au niveau de la France, c'est notamment parce qu'il y est tenu au niveau Européen.

Pourquoi imposer des règles de discipline budgétaire ?

En cas de déficit public excessif, les administrations publiques doivent emprunter sur les marchés financiers, ce qui a pour effet d'augmenter les taux d'intérêt, ce qui a un impact sur les ménages et les entreprises privées. Il s'agit de l'effet d'éviction, qui par ailleurs fait débat au sein des économistes. Certains économistes, notamment opposés à la vision dite classique ou libérale de l'économie, soulignent que le taux d'intérêt n'est pas le seul déterminant de l'investissement, et n'entraînerait donc pas, de facto, une baisse de l'investissement privé à lui seul. De plus, il n'existe aucune preuve empirique de ce phénomène (et l'on constate même un phénomène inverse depuis la fin des années 2010 en France par exemple)[2]

Également, si les ménages considèrent que le déficit public peut provoquer des hausses d'impôts futurs, ils vont créer une épargne et réduire leur consommation, ce qui aura une conséquence directe sur l'économie et réduira la croissance économique.

Contraintes légales et réglementaires

En 1982, sous la présidence de François Mitterrand et sous l'impulsion de Jacques Delors, ministre de l’Économie et des Finances de l'époque, qu'intervient pour la première fois la règle pour le tournant de la rigueur qui impose le non-dépassement des 3%. A l'époque, le déficit budgétaire dépasse tout juste les 100 milliards de francs, mais pour rassurer les marchés, plutôt que de parler d'une somme (qui paraît phénoménale), on utilisera ce critère qui se veut plus rassurant ... Et qui finira par s'imposer même au niveau européen sous l'influence française.

En 1992, le traité de Maastricht, qui constitue l'un des piliers de la construction de l'Union Européenne, impose des critères aux états membres de l'union européenne :

  • Les déficits publics doivent être inférieurs à 3% du PIB ;
  • Les dettes publiques doivent être inférieures à 60% du PIB.

Notons que le déficit budgétaire "au sens de Maastricht" est calculé selon une méthode précise, et qu'on pourra trouver parfois une petite divergence de chiffre suivant qu'on utilise cette méthode ou une autre (par exemple, celle de l'INSEE).

En 1997 (comme dans sa révision de 2005), on retrouve cette limite de 3% dans le Pacte de stabilité et de croissance (qui est une préparation à l'euro en limitant les déficits nationaux qui pénaliseraient l'ensemble de la zone soumis à cette monnaie en devenir)

Critiques contemporaines

Le déficit public est un sujet médiatique récurrent, dont il est important de noter un certain nombre de critiques. On l'a noté plus haut, l'effet d'éviction (qui serait une hausse des taux d'intérêt du fait des investissements massifs de l’État) ne fait pas l'unanimité. On pourra également rappeler que la notion de 3% de déficit n'est qu'une valeur mathématique arbitraire ne reposant pas du tout sur des constats de viabilité de l'économie nationale[3].

Pourquoi se concentrer sur la dette publique et ne pas parler de la dette privée ?

On l'a dit plus tôt, un déficit public, qui est une notion annuelle, vient se répercuter sur l'année suivante et l'on parle alors de dette publique (le stock des déficits successifs non-compensés par les excédents publics). Les deux concepts de dette et de déficit sont donc souvent évoqués ensemble. Or, il apparaît souvent que l'on se concentre sur la dette publique, mais qu'on la compare rarement à la dette privée. Or, la dette privée est bien supérieure à la dette publique, et il n'est pourtant pas immédiat que le secteur privé soit dans une situation inquiétante. De fait, certains dénoncent une instrumentalisation du sujet par la peur, alors même que le sujet mérite approfondissement. A ce titre, on pourra trouver plus de précisions et de chiffres sur la page ad-hoc : ARG : La dette publique française est un problème ? En complément ici, on pourra évoquer[4][5] :

  • une dette privée au 4ème trimestre 2022 calculée à 145,8% de PIB
  • et une dette publique au 4ème trimestre 2022 calculée à 111,6% de PIB

Limiter le déficit et la dette du public, c'est limiter les dépenses

La limitation du déficit public, on l'a vu passe par un certain nombre de leviers, mais les deux évidents sont l'augmentation des ressources de l’État (et, par exemple, l'augmentation des taxes et impôts), et la réduction des dépenses. Mais limiter la dépense publique, c'est donc réduire de facto l'investissement public. Certains pensent que cette règle européenne (et déclinée au niveau national depuis plusieurs décennies) est incompatible avec les investissements nécessaires de l’État pour la relance économique, l'orientation du marché économique, ou de la transition écologique.

Annexes

Sources