Blockchain et cryptomonnaie

De Notes Economiques et Politiques

Cette page est un mélange de définitions précises et de notions qui méritent d'être creusées. J'espère néanmoins qu'elle apportera un éclairage intéressant aux interrogations des wikinautes curieux. Elle traitera de blockchains, de cryptographie, de monnaie, de cryptomonnaie, de bitcoin, d'ethereum, ... Nul besoin d'y connaître quoi que ce soit, tout est ici.

La blockchain

Une définition simple

Une blockchain est une technologie de stockage de l'information, comme une base de données, ou, pour prendre un exemple dans le monde physique, un gigantesque registre, dont une des particularités est qu'elle est décentralisée. Cela signifie :

  • Qu'elle est distribuée (il y en a plusieurs copies "un peu partout"; elle n'est pas stockée en un endroit unique appartenant à une seule entité) ;
  • Qu'elle est accessible à tous (les informations qui y sont stockées sont donc consultables publiquement).

Une autre particularité importante de la blockchain est que l'information qui y est inscrite par les utilisateurs est stockée dans des blocs (il suffit juste de se les imaginer comme des regroupement de données) qui sont cryptographiquement liés entre eux - d'où le terme de blockchain (c'est ce qui garantit leur intégrité[1][2]).

Enfin, dernier point important : le système étant distribué (des copies conformes existant un peu partout), les utilisateurs doivent se mettre d'accord sur un consensus pour synchroniser entre eux les informations inscrites (c'est souvent sur cette partie que les différentes cryptomonnaies se distinguent).

Apports

Finalement, en quoi la blockchain est-elle un concept intéressant : est-ce un phénomène de mode ou un réel apport technologique durable ? Voyons déjà ce qu'elle nous apporte :

  • Une décentralisation des informations :
    • Chaque acteur étant client et serveur de l'information, il garantit la robustesse de l'ensemble du modèle. Ainsi, la blockchain est répliquée (si un acteur la perd, il peut la récupérer à nouveau facilement auprès d'un autre acteur). Un acteur unique ne peut pas la modifier seul, les autres copies faisant foi ;
    • Il n'y a pas une autorité unique qui contrôlerait l'ensemble de la blockchain et qui pourrait la modifier à l'envi.
  • Immutabilité : Nous l'expliquerons plus précisément, mais retenons à ce stade que lorsqu'une action est réalisée, elle est inscrite et l'on ne peut pas l'effacer. Une erreur ne peut donc être corrigée que par une nouvelle action correctrice, on ne peut pas supprimer la première action. De même lorsque je fais un virement d'un compte vers un autre, une fois mon opération validée, je ne peux pas la supprimer. Je dois demander au compte tiers de me faire le virement inverse si je souhaite revenir à la situation précédente.
  • Sécurité : Le fonctionnement général de la blockchain repose sur une mécanique de chiffrement à clé asymétrique. A ce stade, il n'est pas utile de rentrer dans des détails techniques, mais retenons ceci :
    • Chaque utilisateur a une clé publique, connue de tous, et qui permet de l'identifier ;
    • Et une clé privée, qu'il est seul à connaître, qu'il garde précieusement, au secret. Connaître la clé publique ne permet pas de deviner le contenu de la clé privée.

Cette mécanique bien connue du monde de l'Internet et de l'informatique en général est réputée très robuste. Dans notre cas, elle permet d'assurer l'authentification des utilisateurs et la non-répudiation (c'est à dire qu'un utilisateur ne peut pas nier avoir réalisé une opération, s'il l'a vraiment réalisée)

Hypothèses et prérequis

Pour que l'ensemble d'une blockchain fonctionne, il faut un certain nombre de prérequis :

  • L'authenticité des échanges (on l'a vu précédemment, il faut un mécanisme de chiffrement robuste qui le permette, garantissant authentification, non-répudiation et intégrité) ;
  • L'unité des copies des blockchains (ces copies sont stockées sur ce que l'on appelle des nœuds). On parle d'unité des nœuds ;
  • L'unité dans le consensus adopté (évoqué précédemment, c'est à dire être d'accord sur la façon dont les nœuds se synchronisent, c'est à dire comment une modification dans une blockchain est acceptée ou non, et si elle est acceptée, est recopiée sur chacun des nœuds) ;
  • La tolérance aux pannes (sont incluses ici les actions caduques ou malveillantes de certains utilisateurs qui souhaiteraient essayer de modifier frauduleusement la blockchain)

Conclusion

Peut-être que jusqu'ici, tout ceci ne vous paraît pas très concret. Et quel rapport avec de la monnaie ? N'ayez crainte, nous y venons. Essayons juste de nous familiariser avec les quelques concepts évoqués, et gardons les quelques éléments de vocabulaire dans un coin de notre cerveau. Il est temps de parler de monnaie...

La monnaie (quelques notions)

Digressons un instant pour mieux faire le lien entre la blockchain et la cryptomonnaie. Pour se faire, partons de la monnaie pour arriver au bitcoin, qui est la cryptomonnaie la plus connue, et la première qui ait su s'imposer dans la société...

Définition

Si l'on se limite à la définition d'Aristote, la monnaie est :

  • Une unité de compte ;
  • Une réserve de valeur ;
  • Un intermédiaire des échanges.

Elle a également une valeur sociale mais nous ne rentrerons pas dans ces détails ici. Facile, jusqu'ici, non ?

Types traditionnels de monnaie

Quand on parle de monnaie, on doit évoquer les différents types de données :

  • Les denrées rares (figure classique qui vient en tête facilement), ce qui en fait sa valeur est sa valeur intrinsèque (l'or, les métaux précieux, les peaux de bête, les épices, ...) ;
  • La monnaie représentative (l'évolution des denrées rares), qui a l'avantage d'être plus facilement transportable, mais qui est soutenu par une denrée rare (exemple : les certificats d'or ou d'argent représentant le dollar avant les années 70). A tout moment, il est théoriquement possible de transformer cette monnaie représentative en denrée rare, ce qui donne confiance dans la monnaie représentative ;
  • La monnaie fiduciaire, qui n'est soutenue par aucune denrée rare. Elle a de la valeur parce que nous faisons confiance dans celui qui la produit (dans le cas général et très simplifié, un gouvernement) et nous lui faisons tous, communément, confiance ;

Leur point commun, au-delà de la nécessité de l'acceptation commune qu'elles ont de la valeur (en particulier les monnaies représentative et fiduciaire) est la difficulté de "tricher", et donc d'en faire des faux (ce n'est pas forcément impossible, mais ce n'est pas à la portée de n'importe qui, et demande notamment du temps à produire).

Autres types de monnaie

Nous voyons une certaine évolution historique du concept de monnaie, celle-ci se dématérialisant de plus en plus, et finalement, reposant de plus en plus sur une notion de confiance plus que sur un socle de denrée rare. Ainsi, d'autres types de monnaies ont vu le jour, en particulier via le monde du jeu vidéo, et ont clairement pu avoir autant de valeur que la monnaie fiduciaire (par exemple, l'or dans World of Warcraft a pu s'échanger contre des dollars US sur certaines plateformes) :

  • Ajoutons donc la notion de monnaie numérique, qui ressemble à la monnaie dématérialisée qui se cache derrière la monnaie fiduciaire, mais qui n'est pas forcément créée ou gérée par un gouvernement.
    • Mais cette monnaie, là encore, nécessite d'avoir une autorité centrale, qui produit la monnaie numérique, et gère les transactions associées.
  • C'est ainsi que nous arrivons aux cryptomonnaies :
    • Elles correspondent à un besoin d'éviter les travers d'une autorité centrale qui déciderait seule de produire ou non de la monnaie, de la distribuer comme elle le souhaite, voire qui reviendrait sur des transactions passées pour les modifier.

Le bitcoin

Le bitcoin[3], bien qu'ayant été la première cryptomonnaie reconnue comme telle par la majorité, n'est pas la première tentative à mettre en place une monnaie aux transactions décentralisées (c'est à dire dont l'historique est partagé par tous, ce qui en rend le système robuste du point de vue de l'intégrité des transactions). Néanmoins, il est devenu ce qu'il est aujourd'hui :

  • Parce qu'il est décentralisé (et évite donc la centralisation sur une seule autorité, quand bien même elle serait de confiance, de l'historique des transactions, leur gestion, et la quantité de monnaie produite) ;
  • Parce qu'il repose sur une notion de "preuve de travail" sur laquelle nous reviendrons ;
  • Parce qu'il est extrêmement bien documenté, après les essais des premières cryptomonnaies ;
  • Parce qu'il est arrivé au bon moment historique pour son acceptation généralisée.

Sources

  1. L'intégrité cryptographique : c'est la garantie qu'une information n'a pas été modifiée, voire détruite, intentionnellement ou non
  2. Intégrité des données : https://fr.wikipedia.org/wiki/Int%C3%A9grit%C3%A9_(cryptographie)
  3. Le bitcoin, une page incontournable : https://bitcoin.org/fr/