« Guide de la femme intelligente en présence du Socialisme et du Capitalisme » : différence entre les versions

De Notes Economiques et Politiques
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=== Votre loyer ===
=== Votre loyer ===
Ce chapitre critique la propriété privée des logements (en illustrant l'incongruité de la propriété de la terre en la comparant à l'absurdité de la propriété de l'air, de la lumière ou de l'eau). Cette critique s'appuie notamment sur l'injustice de la location (voire de multiples sous-locations). In fine, on reconnaît la encore une critique de la propriété privée, ne souffrant selon l'auteur d'aucun contre-argument :
<blockquote>
Ce mal est si éclatant et si indéfendable par n'importe quel sophisme que pourrait inventer le propriétaire le plus ingénieux, longtemps avant qu'on ne parlât de Socialisme, on avait proposé l'abolition de toutes les taxes, sauf celles sur les propriétés terriennes. D'ailleurs nous avons encore parmi nous des gens qu'on appelle les "''Single Taxers''", qui prêchent cette doctrine de la Taxe Unique.
</blockquote>
Cette partie est également l'occasion pour l'auteur de constater l'exode historique des populations vers les villes (souvent chassées historiquement de leurs campagnes et forêts). Au final :
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Tout ceci aurait pu être évité si nous avions simplement eu le bon sens et la prévoyance d'exiger que la terre reste propriété nationale en fait comme en théorie légale, et que tous les fermages perçus constituent un fonds commun utilisé pour des besoins publics. Si cela avait été fait, plus n'aurait été besoin d'avoir des taudis [...], ni même des impôts et des taxes.
</blockquote>


== Sources ==
== Sources ==

Version du 9 février 2024 à 17:25

Le guide de la femme intelligente en présence du Socialisme et du Capitalisme est un livre écrit par George Bernard Shaw[1]en 1927, et publié dans sa version traduite en français aux alentours de 1928-1929. Il a une vocation féministe, et défend l'idée de l'auteur d'un socialisme éclairé en lieu et place d'un système capitaliste pregnant. Il s'adresse en particulier aux femmes, et le contexte historique s'y prête : en 1928, les femmes britanniques peuvent enfin voter à partir de 21 ans.

Le livre s'articule autour de courts concepts, qui méritent probablement d'être évoqués ici en l'état.

Une question close s'ouvre

La première idée développée dans le livre est que la lectrice doit se poser la question suivante (à laquelle il n'y a pas de meilleure réponse que celle que l'on y apporte soi-même) : "combien devriez-vous posséder et combien devraient posséder vos voisins ?"

Ce que nous devrions d'abord acheter

L'auteur dans ce chapitre rapporte la politique de gestion d'un pays à l'image de la ménagère qui doit gérer son foyer, et prioriser ses dépenses : nourriture, logement, chauffage passent en priorité des frivolités des flacons de parfum et des bijoux. Oui, il faut replacer le propos dans le contexte historique de l'époque....

Il invite également, par des exemples intéressants (et qui ont finalement un goût très actuel), à s'interroger sur les inégalités existantes, et qui sont les exemples d'une prospérité toute relative.

[La] nation, qui dépense de l'argent pour du champagne, avant d'avoir fourni assez de lait pour ses bébés, ou donne de délicats repas à des terriers de Sealyham et à des chiens-loups d'Alsace et à des Pékinois, tandis que le taux de la mortalité infantile montre que ses enfants meurent par milliers, par insuffisance de nourriture, est une nation mal administrée, sotte, vaine, stupide et ignorante.

En voici un autre passage :

Ce n'est pas une excuse à un tel état de choses que de dire : le riche fait travailler. Il n'y a aucun mérite à donner du travail. [...] Un automobiliste qui écrase un enfant donne du travail, à l'ambulancier, au docteur, à l'entrepreneur de pompes funèbres, au prêtre, au marchand de vêtements de deuil, au cocher du corbillard, au fossoyeur, bref, à tant de dignes personnes, que, lorsqu'il finit par se tuer lui-même, il semble que l'on soit un ingrat à ne pas lui élever une statue comme à un bienfaiteur public. L'argent, qui sert au riche à faire travailler de mauvaise manière, ferait travailler d'une juste manière s'il était également réparti

J'aurais prequ'envie de citer l'ensemble du chapitre, mais la ou le wikinaute ici trouvera peut-être le temps long.

Vos achats

Ce chapitre décrit un peu plus la perversité (du fait que le mécanisme de défense par les capitalistes passera par n'importe quelle accusation, fusse-t-elle infondée, voire mensongère) d'un modèle capitaliste, et encense l'idée de nationalisation de services et structure d'intérêt général (et va même parfois plus loin dans l'idée socialiste). On y lit des concepts clés de la critique socialiste du capitalisme, à travers deux exemples principaux : la distribution du courrier en Angleterre (et dans le monde), et l'exploitation du charbon (à cette époque une source d'énergie importante pour les entreprises, les moyens de transports, et les particuliers. La notion de rente ou de profit du capitaliste y est abordée par exemple, et on y trouve également un éloge des services publics (au niveau national comme municipal d'ailleurs).

Vos impôts

Ce chapitre commence par une critique positive du mécanisme des taxes et de l'impôt, qui illustre notamment sa vocation de l'époque à redistribuer les richesses de façon à rendre plus égalitaire la société (en prenant le surplus au riche pour le redistribuer aux plus démunis). Néanmoins, il illustre également les limites du système, dans une société pervertie par certains travers du capitalisme, notamment à travers deux exemples :

  • Le paiement des intérêts liés aux prêts que les plus riches au début de la Guerre ont pu octroyer à l’État ;
  • La fabrique d'obus pendant la Guerre (la Première Guerre Mondiale s'est achevée il y a à peine 10 ans), qui est passée par une tentative des entreprises privées, tentative avortée mais qui coûtera la vie à nombre soldats anglais du fait du peu d'efficacité de leurs mortiers, puis par une nationalisation qui aura prouvé son efficacité par la suite (et qui pourtant sera récriée sitôt la Guerre finie par les mêmes capitalistes).

L'auteur considère qu'il a démontré le souci lié aux taxes, et va dans le prochain chapitre s'intéresser aux impôts proprement dits.

Vos impôts (2)

Ce second chapitre sur la critique de la répartition des cotisations publiques (qu'il appelle d'ailleurs parfois dépenses communistiques rappelle le constat du chapitre précédent sur les taxes, et montre qu'un phénomène similaire, dans une moindre mesure, s'applique aussi pour les impôts. Il explique par exemple que prélever un impôt sur les revenus d'une femme pauvre pour entretenir le gazon d'un parc à chevaux de Londres n'a pas beaucoup de valeur de justice. Il critique également la paresse des instances publiques (gouvernements centraux, municipalités) quant aux choix des adjudicataires (ce qu'on appellerait aujourd'hui des prestataires). De manière générale, la critique de l'impôt dans ce chapitre revient à critiquer l'injustice de celui-ci : la femme de chambre qui travaille quelques heures par jour n'est pas prise en charge par la riche maîtresse dès lors qu'elle quitte le domicile, et est donc aidée par l'ensemble des contribuables grâce à des aides ; c'est donc l'ensemble des contribuables qui paye pour aider cette femme de chambre, et non la riche maîtresse. Voici un autre exemple, très contemporain de l'époque de l'écriture du livre :

[Le] commerçant en boissons prend tout l'argent que paie l'ivrogne pour ses consommations : puis quand il est ivre, il le jette dans la rue, laissant le contribuable payer tout le mal que l'ivrogne peut causer, tous les crimes qu'il peut commettre, toutes les maladies qu'il peut attraper et apporter dans sa famille, et toute la misère à laquelle il peut être réduit. Si tous ces frais étaient inscrits au compte du commerce de la boisson, au lieu de l'être à celui des taxes de police et des pauvres, les bénéfices de ce commerce s'évanouiraient immédiatement.


On y lit également une critique du travail incertain (on peut y retrouver un écho aujourd'hui avec l'uberisation du travail, la multiplication des interims, des CDD, et en général, des emplois précaires), qui d'ailleurs peut provoquer, dans des cas extrêmes dira l'auteur, un comportement que d'aucuns aujourd'hui qualifieraient d'assistanat :

Ce ne sont ici, je le répète, que des cas extrêmes. Les travailleurs honnêtes, qui se respectent, n'agissent pas ainsi ; mais le travail incertain ne tend pas à rendre les gens honnêtes et respectables. S'ils n'étaient pas insouciants et ne buvaient pas plus que de raison pour soutenir leur entrain et abattre leur prudence, jamais ils ne pourraient endurer une pareille incertitude.

Un dernier exemple intervient, enfonçant le clou de l'injustice de l'impôt : les taxes sur les consommations diverses (aujourd'hui, nous pourrions parler de TVA probablement), qui permettent de réduire le coût de l'impôt sur le revenu. Ainsi, c'est parce que tous les consommateurs (donc, tous les contribuables, tout le monde étant obligé de consommer pour simplement vivre) paient cette taxe que les personnes qui ont des revenus peuvent payer un impôt plus faible sur leurs revenus.

Les choses étant telles qu'elles sont, vous pouvez voir comment, même dans vos impôts qui devraient être complètement libérés de la dîme en faveur de l'oisif, vous pouvez être, et vous êtes, en effet, "exploitée" jusqu'à un certain point, tout comme vous l'êtes en faisant vos emplettes ordinaires.

La conclusion du chapitre laisse à réfléchir tout de même, car l'auteur avertit que si les impôts étaient tous abolis, et que l’État et les municipalités étaient remplacés par des entreprises qui rendent les mêmes services, on aurait, non pas un Socialisme statal et municipal mais un Capitalisme statal et municipal.

Votre loyer

Ce chapitre critique la propriété privée des logements (en illustrant l'incongruité de la propriété de la terre en la comparant à l'absurdité de la propriété de l'air, de la lumière ou de l'eau). Cette critique s'appuie notamment sur l'injustice de la location (voire de multiples sous-locations). In fine, on reconnaît la encore une critique de la propriété privée, ne souffrant selon l'auteur d'aucun contre-argument :

Ce mal est si éclatant et si indéfendable par n'importe quel sophisme que pourrait inventer le propriétaire le plus ingénieux, longtemps avant qu'on ne parlât de Socialisme, on avait proposé l'abolition de toutes les taxes, sauf celles sur les propriétés terriennes. D'ailleurs nous avons encore parmi nous des gens qu'on appelle les "Single Taxers", qui prêchent cette doctrine de la Taxe Unique.

Cette partie est également l'occasion pour l'auteur de constater l'exode historique des populations vers les villes (souvent chassées historiquement de leurs campagnes et forêts). Au final :

Tout ceci aurait pu être évité si nous avions simplement eu le bon sens et la prévoyance d'exiger que la terre reste propriété nationale en fait comme en théorie légale, et que tous les fermages perçus constituent un fonds commun utilisé pour des besoins publics. Si cela avait été fait, plus n'aurait été besoin d'avoir des taudis [...], ni même des impôts et des taxes.

Sources

  1. George Bernard Shaw - Wikipedia : https://fr.wikipedia.org/wiki/George_Bernard_Shaw